La junte au pouvoir au Mali a forcé Air France à revoir son projet de reprendre les vols vers Bamako, suspendus depuis deux mois. Après avoir annoncé la reprise via une compagnie tierce, la décision a été annulée suite à des demandes complémentaires des autorités maliennes. Les vols restent suspendus en attendant l’examen de la demande par les autorités aéronautiques nationales. L’accord initial aurait été donné sans consultation appropriée. La situation découle des tensions au Sahel et des récents coups d’État dans la région.
Air France avait suspendu le 7 août ses vols à destination du Mali (7 vols par semaine) et du Burkina Faso (5 vols par semaine) après la fermeture de l’espace aérien du Niger voisin, théâtre d’un coup d’État le 26 juillet. La compagnie avait invoqué la situation géopolitique au Sahel. La région en proie au jihadisme et à la vi0lence a connu une succession de coups d’État militaires, au Mali en 2020 et 2021, au Burkina en 2022 et au Niger en 2023. Les relations entre la France, l’ancienne puissance coloniale engagée militairement dans la région, et les officiers désormais à la tête de ces trois pays se sont fortement détériorées.
La junte malienne avait annulé l’autorisation d’Air France après la suspension de ses vols par la compagnie. Le ministère des Transports a de nouveau reproché à Air France mercredi d’avoir suspendu ses vols “unilatéralement (…) sans informer au préalable, de manière convenable, les autorités et les clients”. Air France avait annoncé mardi reprendre la desserte de Bamako depuis Paris Charles-de-Gaulle au rythme de trois vols directs par semaine les mardis, vendredis et dimanches. La liaison devait s’opérer non plus avec des avions de la compagnie, mais avec un Boeing 777-200 ER de la compagnie portugaise EuroAtlantic Airways et avec des employés de cette société pour constituer l’équipage.
Un responsable proche du dossier a expliqué le choix d’une compagnie et d’équipages tiers par le fait que le ministère français des Affaires étrangères déconseillait “formellement” aux Français de se rendre au Mali, y compris les personnels navigants, en raison de la situation sécuritaire. Les militaires qui ont pris le pouvoir dans les trois pays sahéliens font de la souveraineté leur mantra et ont désigné aux opinions publiques l’allié historique français comme le responsable de leurs maux. Forcée de faire rentrer ses soldats, ses ambassadeurs et une partie du personnel diplomatique, confrontée aux manifestations hostiles et aux attaques contre ses représentations, la France a étendu en août le classement en “zone rouge” aux capitales de ces trois pays, derniers îlots où elle ne déconseillait pas formellement de se rendre.